Beachbrother vous donne rendez-vous tous les mois pour une rubrique consacrée à la préparation mentale, en partenariat avec Noé Grandotto, préparateur mental et coach. Les thèmes proposés s'adressent aux surfeurs de tous les niveaux, pour comprendre à quoi sert la préparation mentale, et surtout, comment l'utiliser pour améliorer son surf.
Avant de se lancer corps et âme dans le sujet, essayons d'introduire ça simplement en répondant à la question :
« De quoi parle-t-on ? »
Prenons le cas d'un jeune surfeur en pole France : il a une vie d'étudiant (lycée, faculté, etc), il a une vie sportive et une vie personnelle.
Ces paramètres impliquent différentes choses : il faut faut assister aux heures de cours, réviser pour ses examens, travailler chez soi ou en groupe en dehors des heures de cours mais aussi s'entrainer physiquement, techniquement, mentalement, se déplacer pour les compétitions, gérer ses temps de repos etc. sans oublier les obligations familiales, les envies évidentes de vie sociale...
Bref, il y a autant de schéma que de personne. Cela nous permet d'observer deux choses :
- On a tendance à s'y retrouver facilement. Tout simplement car cela va de soi !
- La gestion de ces différentes « sphères » de vie n'est pas forcément évidente.
Nous allons tenter de comprendre quel est l'enjeu de ces différentes sphères de vie, et comment s'organise la gestion de nos différents projets.
Etat des lieux
Prenons la situation du jeune sportif de haut niveau.
La Conférence des Grandes Ecoles, via sa revue Grand Angle, s'est intéressée au thème suivant : le sport, les grandes écoles et le haut-niveau. Ce n'est pas pour rien évidemment car être sportif de haut niveau étudiant, c'est être engagé dans deux projets. C'est orchestrer un emploi du temps dense, partagé entre des études ambitieuses et une vie de sportif de haut niveau où les entrainements et les compétitions s'enchainent. Cela peut être une formidable source d'épanouissement, un moyen de développer l'estime de soi, en s'engageant dans 2 projets différents et exigeants, qui nous tiennent à coeur. Dans le même temps, nous constatons que ce double projet peut devenir une source d'interférences comme le doute, la peur de l'échec, le stress, les difficultés à gérer ses émotions, à rester investi dans les deux projets…
Dans le surf on retrouve aisément tous ces paramètres, notamment dans les pôles. Or on le sait, le stress, les émotions, la peur de l'échec et autres influent négativement sur les performances. La non gestion du double projet peut être redoutable sur les performances à long terme des jeunes surfeurs.
La prise de conscience
Nous pouvons rapidement basculer dans une situation de double voir triple projet. Nous avons tous plusieurs sphères de vie et il n'est pas rare de faire le choix de se retrouver dans cette situation.
« La prise de conscience influe sur le changement cognitif et émotionnel et permet d'adopter
un comportement différent au quotidien »
Cela peut paraître simpliste mais prendre conscience de vivre plusieurs projets en même temps est un pas énorme pour le surfeur. L'épanouissement dans cette situation rassure beaucoup au moment où l'on en prend conscience. Mais considérer que cela peut influer sur nos performances permet d'y voir plus clair et de mieux comprendre nos difficultés.
Un double projet pour chacun
Il semble alors important d'apporter une aide et des compétences individualisées. Chaque individu est dans une situation spécifique. Chaque vie a son double projet et ses spécificités. Il faut admettre que l'aménagement d'horaire n'est parfois pas possible ou bien cela n'est pas toujours suffisant. Tous n'ont pas la possibilité de modifier librement leur vie professionnelle et personnelle au service de leur vie sportive. Quant aux étudiants (ou jeunes en pôle par exemple) s'il faut reconnaître les efforts faits par les structures dans l'accompagnement ce n'est pas toujours suffisant. Les jeunes surfeurs en construction d'un projet de haut niveau ont-ils tous aisément aisément à la préparation mentale ?
Afin d'individualiser les solutions nous pouvons soulever plusieurs étapes :
- Informer les surfeurs (et les jeunes !) engagés dans un double projet de la possibilité d'avoir une préparation mentale adaptée.
- Expliquer ce qu'est la préparation mentale, ainsi que la méthode de travail : définition du double (voire du triple) projet, évaluation des habiletés mentales (gestion du stress, confiance en soi, gestion émotionnel, fixation d'objectifs…) puis mise en place d'une planification d'entrainement mental
- Début du travail de préparation mentale pour les surfeurs
Ne pas tout mélanger
Voilà le danger principal du double (voir triple) projet. Tout comme le surfeur est pris dans un « machine à laver » lors d'une grosse chute. Fréquemment les personnes veulent réussir et sont prêts à "tout" pour atteindre leurs objectifs. Leur motivation est très grande, mais ils se rendent compte qu'ils peuvent encore mieux faire. Se pose alors le problème de l'importance de chacun de nos secteurs de vie. S'ensuit généralement celui porté sur les objectifs. Il peut arriver de penser que c'est en faisant le maximum de sacrifices que l'on aura le meilleur résultat. Certains surfeurs peuvent rentrer dans des phases de privations. Ces personnes sont à fond dans leur projet, leur unique projet. Tout leur temps, énergie, et attention sont focalisés sur ce projet.
Dans le même temps, on oublie trop souvent qu'il y a d'autres projets et que notre vie ne peut pas reposer sur un seul pilier ! S'il s'écroule, on tombe ! Imaginons que nous passions 98% de notre temps à fournir des efforts pour réussir notre prochaine compétition. Bien souvent la première chose que l'on remarque c'est l'augmentation naturelle du niveau de stress.
La littérature, les recherches et mon expérience de préparateur mental montrent que le double, voire le triple projet est pourtant salutaire. Certes, il n'est pas possible de donner la même importance à ses 2 ou 3 projets (étudiant, sportif, personnel), mais cela donne un équilibre, une soupape de sécurité. L'individu peut passer de l'un à l'autre. C'est à la fois une chance et une force.
La motivation… et ses objectifs !
Une trop grande motivation provoque une baisse de la performance. Le mieux est l'ennemi du bien. Il est parfois difficile de mener 2 projets de front, mais c'est aussi très souvent excitant. De plus, quand un des projets est en stand-by ou que l'on se trouve en échec, on peut en profiter pour se consacrer un peu plus à sa deuxième sphère.
Il faut déterminer en quelque sorte ce qui a une place importante dans notre vie. Et je connais peu de surfeurs qui durant toute leur vie répondront uniquement le surf.
Il faut donc organiser nos différents projets, apprendre à les gérer dans le temps. Il va donc d'abord falloir lister les sphères et quels sont nos projets dans chacune d'elles. C'est évident qu'il va donc falloir ensuite se fixer des d'objectifs adaptés !
On apprend plus seulement à fixer des objectifs pour le surf mais des objectifs pour chaque sphère suffisamment adaptés pour qu'ils puissent être vécus en même temps. Si l'on augmente notre confiance et notre motivation par de bons objectifs, il est logique que l'on puisse d'autant plus augmenter ces paramètres si l'on forge des objectifs solides pour chaque sphère.
Voici une méthode en 6 étapes assez simple pour « déblayer » le trop de sable sous vos pieds :
- Ma vie de surfeur : Noter le niveau d'engagement porté et expliciter votre projet (vos envies !)
- Ma vie personnelle : Noter le niveau d'engagement porté et expliciter votre projet (vos envies !)
- Ma vie d'étudiant : Noter le niveau d'engagement porté et expliciter votre projet (vos envies !)
- Il faut ensuite passer par une première étape : Se fixer des objectifs de résultats, de maitrises et de processus pour chaque projet !
- Réévaluer le niveau d'engagement
- Faire vire vos objectifs en bâtissant une planification en fonction de ce qui est plus ou moins important.
Avoir de l'ambition c'est bien, mais réussir c'est encore mieux…Et c'est bon pour le moral
Bon surf !
Pour plus d'informations, vous pouvez contacter Noé Grandotto par email (noe.grandotto@gmail.com) ou visiter son site web consacré à la préparation mentale
Crédit photo © Andrew Miller